WINTZENHEIM 39-45

10 janvier 1945 : un obus fait deux morts rue des Laboureurs


WintzenheimJean-Paul Dussel (photo Guy Frank, 29 mai 2004)

Le témoignage de Jean-Paul Dussel

Le 10 janvier 1945, nous faisions de la luge sur le "Waldlawaj", qui mène à la chapelle des Bois. Ce chemin monte au fond le l'actuelle rue Saint-Laurent. De cette hauteur, nous pouvions distinguer les tirs partant des collines du côté d'Ammerschwihr. Soudain, nous avons vu un nuage de fumée monter de la rue des Laboureurs, à Wintzenheim. L'obus visait la maison Hoffert, où était camouflé un camion de transmissions allemand, mais le tir était trop court de 100 ou 150 mètres. Il coûta la vie à Henri Sutter qui revenait de la fontaine de la Porte-Haute, le "Galabrunna", avec deux seaux d'eau à la main. L'obus est tombé juste à côté de lui et l'a tué sur le coup.

Au même moment, nous aperçûmes Joseph Hoffert et Albert Haebig sur le toit de la maison Hoffert. Ils réparaient des tuiles. Voyant tomber ce premier obus à si peu de distance, ils sont descendus du toit pour se réfugier à la cave. Le deuxième obus les a fauchés en haut de l'escalier.

Les jours suivants, Wintzenheim a subi de nombreux tirs d'artillerie. Les Américains cherchaient aussi à atteindre les batteries de canons allemands situés près de l'actuelle rue du Merle donnant sur la rue Saint-Laurent et près du Boden, à l'entrée du Baerenthal.

Source : Jean-Paul Dussel, témoignage recueilli par Guy Frank le 7 avril 2004



WintzenheimCharlotte Misbach (photo Guy Frank, 22 juin 2004)

Le témoignage de Charlotte Misbach, née Bourghart

Je me souviens très bien de ce mercredi 10 janvier 1945. J'habitais chez mes parents au 139 rue Clemenceau, la dernière maison de Wintzenheim en allant vers le Saint-Gilles. Quand je revenais du village ou de l'école, je m'arrêtais souvent chez ma grand-mère, Marie Kempf, place de la Porte Haute, pas très loin du "Galabrunna", et je lui faisais quelques courses. Ce jour-là, elle m'a demandé de lui chercher de l'eau à la fontaine, car l'eau ne coulait plus depuis longtemps au robinet. Généralement, les gens y faisaient la queue en bavardant. Ca prenait du temps car il fallait pomper en actionnant le balancier. Quand je suis arrivée à la fontaine, Henri Sutter discutait avec un voisin. Il ne semblait pas pressé et m'a dit : "Prends seulement ton eau, moi j'ai tout mon temps !". J'ai tranquillement rempli mes seaux, et m'en suis retournée chez ma grand-mère.

Quelques minutes plus tard, Henri Sutter fut mortellement blessé par les éclats d'un obus tombé à deux pas de là, rue des Laboureurs, alors qu'il rentrait chez lui avec son eau. Qui sait, s'il ne m'avait pas cédé sa place à la fontaine...

Source : Charlotte Misbach, témoignage recueilli par Guy Frank le 22 juin 2004



WintzenheimLa maison Moser, 9 rue des Laboureurs, endommagée par un obus le 10 janvier 1945. De gauche à droite : M. Vedovati et Joseph Pagura (maçons), Albertine Moser, Gérard Moser (assis sur le mur), Louis Moser (collection Gérard Moser)

Le témoignage de Gérard Moser

L'obus qui a coûté la vie à Henri Sutter, à fait une autre victime, le petit Claude Comartin qui jouait à ce moment-là dans la rue des Laboureurs.

Claude Comartin était le fils de Florence Comartin (née Steinbrunner en 1919), originaire de Wintzenheim. Elle habitait Strasbourg, mais quand son mari fut incorporé de force, elle est revenue à Wintzenheim, auprès de sa famille accueillie dans la cave des Moser, 9 rue des Laboureurs. Dans l'après-midi du 10 janvier 1945, le petit Claude (né à Strasbourg en 1938) joue dans la rue. Il confectionne un bonhomme de neige. Quand sa mère entend les tirs d'artillerie, elle lui crie : "Claude, viens vite dans la cave, te mettre à l'abri !". Mais il est déjà trop tard... Les Alliés stationnés du côté d'Ammerschwihr et de Sigolsheim cherchent à détruire un véhicule de transmissions allemand repéré dans une grange 11 rue des Laboureurs. L'obus tombe sur la maison voisine, le 9, celle où habitent les Moser. Les éclats tuent net Henri Sutter qui revient de la fontaine où il venait de bavarder avec André Kunegel, et blessent au ventre le petit Claude, qui s'adresse à une voisine : "Je saigne au ventre, vous croyez que c'est grave ?" avant de s'évanouir. Il est évacué à l'hôpital de Colmar où il décède deux jours plus tard, dans la matinée du 12 janvier...

Source :  Gérard Moser, Saint-Louis, témoignage recueilli par Guy Frank le 25 janvier 2005



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