Eugène BOEGLIN, condamné à mortEugène BOEGLIN est né le 8 novembre 1912 à Michelbach-le-Haut dans le Sundgau, dans une famille d’agriculteurs catholiques et anti-communistes. Après des études au collège épiscopal de Zillisheim, il intègre l’École Normale de Colmar dont il sort en 1932 en tant qu’instituteur. Il est nommé à Richwiller puis à Wintzenheim. En 1934-1935, il fait son service militaire au 152e Régiment d’infanterie à Colmar. Il entre comme élève-officier de réserve à l’École de Saint-Maixent et est tout fier d’annoncer à sa fiancée Jeanne Hoffert, qu’il a réussi la formation à la 25e place et à la première place des Alsaciens, manifestant ainsi sa fierté patriotique. En 1939, il est élevé au grade de lieutenant de réserve avec effet rétroactif au 7 septembre 1938. De retour à la vie civile, il est nommé professeur adjoint à l’école d’agriculture de Rouffach. Affilié au Syndicat National des Instituteurs, il devient aussi secrétaire de la section communiste de Rouffach, secondé par Jeanne HOFFERT, originaire de Wintzenheim et devenue son épouse le 24.12.1936, également communiste. Dès la déclaration de guerre, il assure la formation des hommes mobilisés au centre de mobilisation de Thann. À l’automne 1940, il est muté en Allemagne pour une période appelée « Umschulung », c’est-à-dire une rééducation professionnelle et idéologique conforme aux attentes du Reich. C’est sans doute en 1941 qu’il devient membre du Parti communiste en Alsace, dont Georges Wodli est l’un des dirigeants. Le 25 mai 1942, il est arrêté par la Gestapo pour son appartenance au parti communiste, interné au camp de Schirmeck jusqu’en novembre, puis emprisonné à Buhl (Baden). Accusé de haute trahison et action en faveur de l’ennemi devant le Volksgerichtshof (Cour de Justice du Peuple) siégeant à Strasbourg, il est condamné à mort en même temps que René Birr, Adolphe Murbach et Auguste Sontag. Malgré différentes démarches entreprises par sa famille pour le sauver, les magistrats restent inflexibles. Sa femme peut lui rendre une dernière visite : physiquement brisé, il se déplaçait à l’aide de cannes. Le 31 mai 1943, en application du rejet d’un recours en grâce, le procureur et le greffier principal se rendent dans la cellule du condamné et lui annoncent que l’exécution est fixée au lendemain, 1er juin 1943 à 5 heures. Eugène accueille la nouvelle avec calme. Il demande l’assistance d’un prêtre et l’autorisation d’écrire à son épouse. Dans cette lettre il demande pardon aux siens et en particulier à Jean-Claude, son petit garçon, pour la peine causée et l’opprobre dont ils souffriront. Il retrouve la foi chrétienne de son enfance et demande à tous de ne pas l’oublier dans leurs prières. En signe de repentance, il offre à Dieu toutes ses peines et ses souffrances ainsi que cette mort si proche, qu’il accepte, dans l’espérance de la Rédemption. La dernière lettre d’Eugène ne parviendra jamais à son épouse car elle sera censurée par le Directeur de la prison sous le prétexte de réserves quant à son contenu. Les quatre condamnés sont guillotinés dans la cour intérieure de la prison de Stuttgart à l’aube du 1er juin 1943. Leurs corps seront remis à divers instituts d’anatomie avant d’être jetés dans une fosse commune au Bergfriedhof à Heidelberg. Jeanne BOEGLIN reçut un ordre d’expulsion hors de l’Alsace le 6 août 1943, émis par la police de sécurité du Reich. Devant se présenter devant les autorités responsables de la SS et de la Police à Stuttgart, elle est envoyée à Fribourg-en-Brisgau où elle sera employée dans un hôtel en tant que femme de ménage jusqu’à la fin de la guerre. Revenue à Wintzenheim en 1945, elle se remarie en 1947 et fonde une nouvelle famille avec Raymond Weygand. Elle décède, malheureusement très jeune, le 15 septembre 1950. Société d'Histoire de Wintzenheim, Marie-Claude Isner et Daniel MorgenSources : |
(collection Yvonne Beyer)
Né le 8 novembre 1912 à Obermichelbach (appelée depuis 1919 Michelbach-le-Haut, Haut-Rhin), guillotiné le 1er juin 1943 à Stuttgart, Allemagne ; instituteur, puis professeur-adjoint dans le Haut-Rhin ; communiste ; syndicaliste CGT ; résistant ; condamné à mort le 28 janvier 1943 par le Volksgerichtshof.
Fils de paysans catholiques pratiquants et anticommunistes virulents, Eugène Boeglin fréquenta le collège épiscopal de Zillisheim (Haut-Rhin), puis l’École primaire supérieure de Saint-Louis (Haut-Rhin) avant d’être admis à l’École normale catholique de Colmar (Haut-Rhin), dont il sortit en juillet 1932. Il fit un stage à Dijon (Côte-d’Or) où il commença la préparation d’une licence à l’université, puis fut nommé instituteur dans le Haut-Rhin à Richwiller, puis à Wintzenheim. En 1934-1935, il fit son service militaire comme sous-lieutenant au 152e Régiment d’infanterie à Colmar (ce qui indique qu’il avait brillamment effectué sa Préparation militaire supérieure à l’École normale). En 1935-1936, après quelques mois comme secrétaire-adjoint à l’Inspection académique du Haut-Rhin, il fut nommé professeur adjoint à l’École d’agriculture de Rouffach (Haut-Rhin). Syndiqué à la section du Haut-Rhin du SNI, dite « La Fraternelle », puis au syndicat CGT des professeurs adjoints, il avait adhéré à la section de Colmar du Comité de vigilance des intellectuels antifascistes, dont il fut le secrétaire, et fondé un « Groupement des Jeunes de l’Enseignement ». En novembre 1935, Marguerite Buffard, alors professeur de philosophie à l’École normale de Colmar, le mit en contact avec Charles Aschbacher et il adhéra au Parti communiste. Quand il arriva à Rouffach, il devint secrétaire de la section communiste, dont il porta les effectifs de 5 à 256 membres. Il avait été sollicité en 1938 pour suivre les cours de l’École léniniste de Moscou, mais il retira sa candidature devant l’opposition résolue de son épouse, mais aussi en raison de l’impossibilité d’obtenir un congé de convenances personnelles qui lui aurait assuré sa réintégration dans l’enseignement à son retour en France.SOURCES :
– RGASPI, Moscou, 495 270 4151.
– Arch. Dép. Haut-Rhin, AL 66 541.
– L’Humanité d’Alsace et de Moselle, 28 janvier 1945, 4 avril 1945.
– Bulletin provisoire de la Fraternelle, Mulhouse, s.d. (juillet 1945)
– Heimat unterm Hakenkreuz, 1953, p. 41.
– Resistance im Annektierten Elsass und Lothringen, numéro spécial de l’Humanité d’Alsace et de Lorraine, janvier 1965 (photo).
– Charles Béné, L’Alsace dans les griffes nazies, T. IV, Raon-l’Étape, 1978, p. 38, 45, 54-56, 61-62.
– Léon Tinelli, L’Alsace résistante, Strasbourg, 2002 (photo p. 113).
– Marie-Joseph Bopp, Ma ville à l’heure nazie ; Colmar 1940-1945, Strasbourg, 2003, p. 274.
– Walter Wagner, Der Volksgerichtshof im nationalsozialistischen Staat, Munich, 2011, p. 475-476.
– Note de Daniel Morgen, auteur de Mémoires retrouvées. Des enseignants alsaciens en Bade, Des enseignants badois en Alsace, Umschulung 1940-1945, 15 janvier 2015.
https://fusilles-40-44.maitron.fr/spip.php?article17018
Eugène BOEGLIN, instituteur, né à Michelbach-le-Haut (Haut-Rhin) le 8
novembre 1912, 24 ans, domicilié à Rouffach, fils de Albert Boeglin,
cultivateur, et de Eugénie Wilhelm, sans profession, son épouse, domiciliés à
Michelbach-le-Haut, a épousé le 24 décembre 1936 à Wintzenheim
Marie, Lucie, Jeanne HOFFERT, sans profession, née à Wintzenheim, annexe
Logelbach (Haut-Rhin) le 30 septembre 1914, 22 ans, domiciliée à Wintzenheim,
fille de Jean Hoffert, décédé et de Lucie Hagenmuller, receveuse des Postes, sa
veuve, épouse en secondes noces de Jean Ulmer, employé des Postes et
Télégraphes, domiciliés en cette commune.
Contrat de mariage reçu le 21 décembre 1936 par Me G. Wahl, notaire à Kaysersberg.
Mention marginale : Der Ehemann ist am 1. Juni 1943 in Stuttgart verstorben (St. A. -Staats Archiv- Stuttgart Nr 2852/1943).
Jeanne HOFFERT, remariée à Raymond WEYGAND le 4 janvier 1947 à Wintzenheim, est décédée
le 15 septembre 1950 à Bourg-en-Bresse après avoir donné naissance à leur fille
Isabelle.
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Eugène et Jeanne BOEGLIN vers 1935-1936 (archives Jean-Claude Boeglin)
Eugène BOEGLIN et Jeanne HOFFERT eurent un fils : Jean-Claude, né à Colmar le 9 janvier 1938, et décédé le 31 juillet 2004 à Eguisheim.
De son second mariage avec Edith CLAVILLIER, Jean-Claude BOEGLIN a eu deux enfants : Stéphane, né en 1972, et Damien, né en 1976, petits-fils donc d'Eugène BOEGLIN.
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Jean-Claude BOEGLIN avec ses parents Eugène et Jeanne en 1940, et avec son père Eugène en 1941 (archives Jean-Claude Boeglin)
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Jean-Claude BOEGLIN adolescent (à gauche) et adulte, en 2000 (archives Jean-Claude Boeglin)
De droite à gauche : Damien et Stéphane Boeglin, les fils de Jean-Claude, et Anne-Marie, sa troisième épouse.
A gauche : Marie-Claude Isner, présidente, et Guy Frank, responsable Photothèque de la Société d'Histoire de Wintzenheim
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